Politiquement pop’ – 2/2

Voici la suite de Politiquement Pop’notre feuilleton de rentrée bien moins classe que Dallas. Pour rappel, il s’agit de balayer les principaux partis politiques français et d’y associer une chanson pour constituer une playlist qui enflammera à coup sûr la prochaine session parlementaire nocturne. Nous avions il y a quelques jours fait le tour de la gauche. Nous poursuivons aujourd’hui notre exploration musicale de la politique française à tribord. Pour écouter la playlist, c’est par ici.

La République En Marche (LREM)

« Ah, il sait mettre l’ambiance ce Patoche ! »

On ouvre donc le bal avec les troupes d’Emmanuel Macron, l’homme qui a fait voler en éclat tout le jeu politique français d’un simple tour de passe-passe. C’est un peu le Dani Lary de la politique. Patrick Sébastien lui aurait accordé sans peine une standing ovation dans le Plus Grand Cabaret du Monde en s’exclamant, « Putain, c’est génial, on n’a rien vu venir ! » avant d’entonner son dernier tube entouré de troubadours uniquement vêtus de slips à paillettes ornés de plumes.

Tout le monde ironisait en mai 2016 sur les « marcheurs », ces sortes de témoins de Jéovah des temps modernes qui faisaient du porte-à-porte en interrompant les grasses matinées pour prêcher la bonne parole libérale. Pourtant, un an plus tard, leur messie faisait une OPA sur l’Elysée, entraînant le Parti Socialiste aux soins palliatifs et expédiant Fillon et son commis (pas d’office) dans les cuisines de la justice pour récurer les casseroles. Un véritable tour de force que Jupiter conclut en l’espace de quelques semaines par la création de toutes pièces d’un parti pour gagner les législatives avec des opportunistes de tous bords. Le triomphe est total, les marcheurs ne se sentent plus tirer un bock, tout comme Nemo qui baptise la cheminée élyséenne.

Toutefois, à l’instar d’un emménagement, il a fallu meubler le parti avant de pouvoir poser ses pieds sur le bureau, une Jupiler dans une main, la télécommande dans l’autre. Mais à vouloir faire vite et pas cher, on commet inévitablement quelques fautes de goût. C’est ce qu’il se passe notamment lorsqu’on ne recrute plus à la sortie de l’ENA, mais à la sortie de RMC une députée épinglée pour fautes de gestion, qui ignore que Mayotte est un DOM et est capable d’enjoindre les étudiants de ne pas trop la ramener en cas de baisse des APL. Oh que c’est petit, Claire ! Puis tant qu’à demander aux plus précaires de se serrer la ceinture (ou le câble électrique qui en fait office), pourquoi ne pas solliciter les retraités ? C’est vrai, enfin, ils « peuvent faire un effort » répondrait Aurore Berger à la vieille bergère ! Bref, il ne faudra pas trop compter sur le chèque de mamie à Noël. A moins que la position de Berger, qui change d’étoile aussi rapidement que le pivotement d’une girouette un jour de tramontane, ne finisse par évoluer une nouvelle fois.

Ainsi, concernant la ligne politique, pas de grande surprise, le vernis social n’a pas tardé à s’écailler. Après tout, attendre d’un ancien banquier d’affaire qu’il mène une politique de gauche, c’est comme imaginer Monsanto ouvrir une AMAP. Bref, ceux qui ne sont rien resteront sur le quai, surtout si c’est jour de grève. De ce point de vue, le « nouveau monde » n’est pas si disruptif. Au contraire, on note même un retour en flèche de la courtisanerie. Les « groupies du capitaliste » sont prêtes à tout pour défendre l’honneur de leur suzerain, même à dépasser les limites de la mauvaise foi… Elles n’hésitent pas à aller à la Castagne, tel un Benalla lâché place de la Contrescarpe. Leur combativité est d’ailleurs reconnue : le gouvernement s’est vu à ce titre gratifier d’un Gérard de circonstance. Mais le châtelain de la rue du Faubourg Saint-Honoré sait se montrer magnanime et récompense la loyauté de ses sujets : il n’y a qu’à traverser la rue de l’Université pour trouver un poste à LREM. Comme ce fut le cas pour le maréchal Ferrand, qui a pris les rênes de l’Assemblée Nationale, tandis qu’il croisait le fer avec la justice dans l’affaire des Mutuelles de Bretagne. Mais soyons rassurés, il a d’ores et déjà prévenu qu’il ne démissionnerait pas s’il était mis en examen. Le nouveau monde a de beaux jours devant lui.

La chanson pour Macron : L’homme pressé – Noir Désir

La chanson pour LREM : La groupie du pianiste – Michel Berger

Les Républicains (LR)

Il est 19h33, lorsque la tête d’affiche, Lolo, s’avance sur scène avec sa tignasse plus sel que poivre, volontairement décolorée pour tenter de convaincre son audience qu’il n’est pas né de la dernière pluie en Velay. Affublé de son inséparable parka rouge, qui n’est pas sans rappeler la chasuble d’un Jean-Marie Le Pen implorant Jeanne d’Arc un 1er mai, il débute son spectacle par une imitation ultra-réaliste d’un leader frontiste. C’est à s’y méprendre : on retrouve les mêmes thématiques – impôts, immigration, délinquance -, la même rhétorique populiste et anxiogène aux relents de globalophobie*. Mais Lolo sait aussi donner une tonalité plus légère à son spectacle, comme lorsqu’il demande à Emmanuel Macron de « rendre l’argent aux français ». En réalité, il fait ici référence à l’employé aux pompes Berluti funèbres qui a assuré la première partie de son spectacle et qui avait refusé de quitter la scène alors que la foule criait « Remboursé ! ».

A la sortie, l’attachée de presse de Lolo, une dénommée Momo, se plie à l’exercice des interviews. Rapidement, les questions pleuvent quant aux soubresauts de son poulain qui, à force de jouer avec le feu tricolore trop près du Buisson, a fini par enflammer de nombreuses haies qui faisaient jadis office de garde-fous. Voilà Momo embarrassée face à ces journaleux à la cravache bien tendue. Elle joue alors la carte de la « bien-pensance », botte secrète permettant de clore un débat dès que des notions telles que le « vivre-ensemble » sont évoquées. Pas de temps à perdre, elle doit filer retrouver son amie noire qui lui a préparé un couscous.

Malheureusement pour Lolo, le taux de remplissage de la salle est inversement proportionnel à celui du casier judiciaire de bon nombre de ses prédécesseurs : le spectacle semble faire pschitt. Cela aurait peut être mieux fonctionné à Vichy. Même dans les rangs de Lolo, les sièges se vident, à commencer par Pécresse qui est partie démonter les strapontins de la ligne 13 ou de Calmels partie rouler sa bosse en Gironde. Et ce, sans compter les « Constructifs », qui avaient déjà déjà quitté le navire pour se rapprocher de la majorité présidentielle. Ou comment déguiser son opportunisme en conscience républicaine.

*Globalophobie : Le rejet de tout ce qui n’est pas un électeur français depuis 10 générations de plus de 60 ans, blanc, catholique, marié avec enfants, fan de Michel Sardou et de saucisson Justin Bridou.

La Chanson pour LR : Le Bruit et l’Odeur – Zebda

Le Front Rassemblement National (RN)

Roulement de tambour : on passe au parti préféré des marchands de lessive. Parce que le linge sale se lave en famille, dit-on. Et on ne peut pas nier qu’ils le fassent depuis plusieurs générations. Mais malgré toutes ces années de lavage, les oripeaux dégagent une odeur toujours aussi nauséabonde.

Qu’importe, pourquoi ne pas vendre son programme comme un baril de lessive qui lave plus blanc que blanc et faire croire aux mérites d’une politique Décolor Stop pour éliminer tous les problèmes ? La France Black Blanc Beur ? Nein ! Surtout ne pas mélanger les couleurs ! Et puis, le blanc, c’est la pureté, l’innocence, pas comme tous les autres partis qui trempent dans les affaires. Mais à y regarder de plus près, il semblerait pourtant que le FN se soit quelque peu sali avant de vite se changer (de nom)… Encore un coup de ces satanés merdias menteurs ? Bref, restons sur du bleu foncé, ce sera moins salissant.

Cela fait tout même tâche de voir ceux qui s’étaient autoproclamés pourfendeurs du système « UMPS » et de ses petits arrangements éclaboussés à leur tour par des enquêtes judiciaires… Quant à la globalisation idéologique jadis pointée du doigt par le parti sur sa gauche, elle le concerne désormais au premier plan, depuis que le duc du Puy-en-Velay est venu chasser sur ses terres. A quand l’officialisation du « système LRN » ? Ce serait le comble de la dédiabolisation.

Il faut dire que depuis plus d’une dizaine d’années, les cadres n’ont pas ménagé leurs efforts pour donner une apparence fréquentable au parti. Marine a sorti l’adoucissant ! La façade a été ripolinée, l’enseigne changée. Mais dans l’arrière boutique, on entend toujours les mêmes vieilles rengaines… Et on utilise les mêmes méthodes, en accusant les médias coupables de désinformation, ou auteurs de censure. Mais lorsque le RN se dit boycotté, les médias répondent que le parti cultive sa rareté de manière à pouvoir se victimiser. Dans tous les cas, cela donne du grain à moudre aux théories complotistes… Mais peut-on vraiment parler d’absence dans les médias quand Florian Philippot, lorsqu’il était encore au bercail, passait en moyenne dans les médias tous les 2 jours ?

Malgré tout, même si le danger n’est jamais très loin, il est rassurant de voir que la flamme commence à vaciller avec le déclin du nombre d’adhérents et la baisse du budget. Mais restons vigilants, il n’est pas exclu d’entendre dans quelques mois Marion Maréchal claironner « Me voilà ! »…

La chanson pour le RN : Front contre Front – Svinkels

Bonus track : Plus jamais ça – NTM

Bonus track 2 : Douce France – Carte de séjour

Fais pas ta morue, partage !

Jean-Jacques Gourdin

Je suis le maton de la station, prends garde à mes coups de bâton. Viens dans le poste, je vais te faire des bosses.